Thierry Marquet : “L’humour, c’est réussir à faire rire quelqu’un qui n’avait pas envie de rire”.

Thierry Marquet a 37 ans  dont cinq passés sur scène à croquer les travers de ses contemporains et les siens, bien sûr.  Elève  et étudiant dissipé, il faisait rire son petit monde avant même de songer à en faire un

Thierry Marquet

métier. Et ce ne sont pas les quelques années passées à la fac de Droit qui ont tempéré son envie de faire le pitre. Bien au contraire. C’est dans ce registre qu’il puise son énergie et une certaine vitalité qui en font un humoriste à suivre. Mais entre faire rire ses potes et monter sur scène, il y a quelques étapes à franchir. Après avoir travaillé quelques années pour TSE (Tout Sur l’Ecran, la production des émissions de Laurent Ruquier),Thierry Marquet décide de passer à l’acte, encouragé par la productrice Catherine Barma. “Je faisais rire la bande dans les coulisses, confie Thierry Marquet, et un jour Barma m’a dit : “On va te mettre à l’antenne”. Voilà comment celui qui réalisait, dans l’ombre, des caméras cachées, s’est retrouvé sous le  feu des projecteurs. Parce qu’il fait rire pas mal de monde, j’ai voulu savoir ce qui faisait rire THIERRY MARQUET.

“COMMENCER PAR RIRE DE SOI AVANT DE RIRE DES AUTRES, ÇA FAIT DU BIEN”.

LEBLOGFEMMEQUIRIT. Quelle est votre définition de l’humour ?

THIERRY MARQUET. C’est de réussir à faire rire quelqu’un qui n’avait pas envie de rire (comme un chien, par exemple).

LBFQR. Qu’est-ce qui vous fait rire depuis toujours ?

TM. Les politiques qui, par une pirouette, ne répondent jamais aux questions qu’on leur pose mais qui vous placent ce qu’ils avaient prévu de dire dans une interview. Voilà, c’est ce que je viens de faire.

LBFQR. Quels humoristes de la nouvelle génération vous font rire ?

Jeff Panacloc et Jean-Marc ©Ingrod Mareski.

TM. Nouvelle génération ? Je pense de suite à ODB (Ndlr : Olivier de Benoist) et Panacloc mais il y en a tellement qui méritent de faire une carrière ! Comme Vincent Piguet, Alfred Dumont, Julie Gallibert, Leïla Olabi. L’artiste qui m’impressionne le plus : c’est Michael Gregorio.

LBFQR. Quelle histoire, anecdote, situation (pas) drôle ne fait rire que vous ?

TM. Les aléas de la scène. Au Bacchus de Rennes, je suis tombé sur un spectateur qui commentait toutes mes vannes. Ça m’amusait à moitié car ça dérangeait tout le monde jusqu’à ce que les autres lui demandent de sortir en scandant : ” Dehors ! Dehors !”. Il s’est levé et a rétorqué : “Ah non ! Je suis déjà interdit de camping, ça va !”. Là, il m’a achevé.

LBFQR. Qu’y a-t-il de plus drôle dans votre personnalité ?

TM. On dit que je suis pince-sans-rire. J’ai un visage qui ne sourit pas voire très froid. Ce qui fait que quand je plaisante on croit que je suis sérieux. Ça crée des problèmes, faut que je désamorce avant qu’on me frappe. Parfois, j’oublie de désamorcer.

LBFQR. De quelle façon riez-vous de vous ?

TM. C’est un sujet de philo? Je me penche un peu sur la gauche, j’ai un rictus à droite. J’aime bien l’autodérision : commencer par rire de soi avant de rire des autres, ça fait du bien .

LBFQR. A quel moment de votre vie vous êtes-vous aperçu que vous aviez un talent comique ?

TM. J’ai été renvoyé de la Maternelle, je n’faisais pas la sieste ! Au collège, mon carnet de correspondance; au lycée, les remarques sur mes bulletins : “Ma classe n’est pas un cirque ! “, “Pense plus à s’amuser et à amuser”, “Peut faire carrière dans le comique, pas encore au programme” ...

 “CELUI QUI M’IMPRESSIONNE LE PLUS C’EST PIERRE AUCAIGNE ET, DANS UN AUTRE STYLE, LAURENT BAFFIE POUR SA RÉPARTIE”.

Laurent Baffie © Jean-Marie Périer

LBFQR. Etiez-vous un petit garçon, un enfant et un ado drôle ?

TM. Drôle, oui, mais lourd aussi et du coup chiant !

LBFQR. Comment avez-vous développé ce talent au moment où vous le décelez?

TM. C’est un prof de français, M. Lirot, qui m’a choisi et poussé à jouer dans une pièce pour la kermesse du collège. Il disait à mes parents que ça canaliserait mon énergie …ça a marché! Merci à lui, s’il vous lit !

LBFQR. Aujourd’hui, comment cultivez-vous ce talent ? De quoi le nourrissez-vous ?

TM. On essaie d’être à l’affût de l’actualité et de trouver des bonnes vannes à faire pour les réseaux sociaux. Bien que je garde les meilleures pour mon one afin de pas retrouver mes vannes dans un autre spectacle. J’aime bien aussi les cafés PMU, un vivier d’auteurs au comptoir !

LBFQR. Vos profs disaient que vous pourriez “faire dans le comique”. Aujourd’hui, vous préférez qu’on dise que vous êtes un comique ou un humoriste ?

TM. Je préfère humoriste, ça fait plus sérieux. Quel paradoxe ! Quand j’entends : “Tiens v’là le comique !”, ça fait un peu péjoratif, un peu bouffon ! En fait, ça dépend de qui en parle. Si Gad dit en parlant de moi : “Il est bon ce comique”. Je prends …

LBFQR. Quand, où et pourquoi avez-vous ri la dernière fois ?

TM. Un soir, après le spectacle à Nantes (à La Compagnie) j’étais plutôt content de moi. Je demande à quelqu’un qui vient de voir mon one : “Alors, vous avez trouvé ça comment ?” . La personne m’a répondu sans ironie : “Par hasard”. J’ai ri jaune.

LBFQR. Quelle est votre humoriste femme préférée ?

TM. Je n’vais pas être original mais c’est Foresti parce que je l’ai vue exploser. J’étais dans La Bande à Ruquier (je faisais les caméras cachées de «On a tout essayé» en 2004-2005) et Florence est arrivée avec ses personnages en plateau. Les caméras cachées se sont arrêtées et elle a eu la carrière qu’elle méritait derrière. Une sacrée bosseuse !

“J’ÉVITE LES BLAGUES SUR LES CATASTROPHES PARCE QUE J’AI PERDU UN AMI DANS LE RIO-PARIS…” 

Florence Foresti dans Barbecue © Studio Canal.

LBFQR. Et votre humoriste homme préféré ?

TM. Coluche ! Sans hésiter ! Les textes qu’ils faisaient il y a trente ans marchent encore aujourd’hui. Il était vraiment en avance sur tout ! Celui qui m’impressionne le plus c’est Pierre Aucaigne et dans un autre style Laurent Baffie pour sa répartie.

LBFQR. Quelle(s) personne(s) (connues ou non) déclenche(nt) invariablement votre rire ?

TM. J’adore les gens complètement à côté de la plaque. Les gens qui pensent toujours avoir raison, ceux qui ont la science infuse…Ce sont des personnages qu’on croise souvent au comptoir.

LBFQR. Pensez-vous qu’il y a un humour féminin et un humour masculin ?

TM. Dans les années 80, oui. Les mecs tapaient un peu sur les filles et inversement. Aujourd’hui, la nouvelle génération le fait moins. Dans le stand-up par exemple, les thèmes abordés peuvent être dits aussi bien par un homme que par une femme.

LBFQR. Quelles sont vos comédies préférées ?

TM. Les Bronzés font du ski reste culte, Profs aussi Dikkenek puis Nos jours heureux, et plus récemment Babysitting. Enfin de la bonne vanne dans un film français !

LBFQR. Quels livres (roman, théâtre, BD, poésie…) vous font éclater de rire ?

TM. Je suis un inconditionnel de Beigbeder. Je préfère les livres qui nous renvoient à nous. Le dernier livre que j’ai lu c’est J’ai épousé un con (Ndlr: d’Agnès Bouquet, aux Editions Pocket) je l’ai offert à ma femme…

LBFQR. Quelle est votre réplique culte préférée ? (citation de film, livre, sketch…)

TM. “Tu ne te permets rien ! Tu vas d’abord me soigner cette mauvaise peau, ensuite tu te permets”. (Poelvoorde dans C’est arrivé près de chez vous).

“LE RIRE QUE JE PRÉFÈRE : CELUI D’HUMORISTES DANS LA SALLE QU SENTENT QUAND UN TRUC N’EST PAS PRÉVU”.

LBFQR. De quelles personnes (connues ou non) aimez-vous entendre le rire et pourquoi ?

TM. De mes parents parce qu’ils sont venus me voir souvent depuis cinq ans. Mais le rire que je préfère c’est celui de comédiens humoristes dans la salle qui sentent quand un truc n’est pas prévu. Ce sont les seuls qui peuvent rire dans un silence !

LBFQR. Quels humoristes emmèneriez-vous avec vous sur une île déserte ?

TM. J’en n’emmènerai qu’une : Leïla Olabi ! Elle n’est pas encore connue avec son one “Leïla Olabi vous met en boîte”, elle est jolie, drôle, intelligente…et c’est aussi ma chérie !

LBFQR. Si vous deviez vous réincarner en humoriste dans la peau de qui voudriez-vous renaître ?

TM. Ça va faire présomptueux mais dans la mienne ! Avec juste un peu plus de visibilité médiatique, une grosse production derrière et un attache de presse genre Stéphane Cohen ! Vous Voyez ? (Ndlr : Stéphane Cohen est un attaché de presse de l’agence Impresario, qui gère les relations avec la presse d’artistes comme Jeff Panacloc, Christelle Chollet, Verino, entre autres…)

LBFQR. Pensez-vous qu’on puisse rire de tout ?

TM. Oui mais pas avec n’importe qui comme l’a dit Desproges. Ça dépend où, quand et comment. Chacun se fixe ses propres limites. Si un humoriste prévient que c’est de l’humour noir, les gens savent ce qu’ils vont voir ça ne pose pas de problèmes …

LBFQR. Quelles sont vos limites ?

TM. J’ai perdu un ami dans le Rio-Paris, je ne peux plus rire de ça. J’essaie d’éviter les blagues sur les catastrophes parce que celle-ci m’a touché de près. J’essaie d’éviter les blagues morbides du coup parce que je ne connais pas la vie des gens dans la salle. Je suis là pour les détendre et pas les ramener à des souvenirs douloureux .

LBFQR. Qu’est-ce qui ne vous fait pas rire du tout ?

TM. Les twits méchants sur les sportifs de haut niveau. Je pense à Tsonga notamment, ça doit être le premier déçu quand il perd un match. Les réseaux sociaux s’acharnent et les mêmes l’encensent quand il gagne. Ça ne me fait jamais rire, je pense à la personne qui lit ces commentaires au lendemain d’une défaite …

LEBLOGFEMMEQUIRIT. Quels spectacles d’humour recommandez-vous de voir en ce moment ?

TM.Vincent Piguet, pour la drôlerie et la construction de son one-man-pièce. Alfred Dumont pour sa folie …il y en a tellement que je pourrais vous citer ! De manière générale, faites confiance aux café-théâtres de vos villes (Gerson, Bacchus, Compagnie, Luna Negra …)
qui programment des artistes pas connus. S’ils sont programmés c’est qu’ils sont franchement bons! S’ils ne passent pas à la télé c’est juste qu’ils ne sont pas produits mais ça ne voudra jamais dire qu’ils sont moins bons juste qu’ils n’ont pas rencontré la production qu’il leur faut . bon entendeur…