Karine Dubernet s’éclate au Palais-Royal !

Karine Dubernet jouera le 23 avril au Théâtre du Palais-Royal le show époustouflant qu’elle livre tous les dimanches au Point-Virgule. Elle connaît bien le Royal pour y être quasiment tous les soirs dans Les Bonobos de Baffie, auteur avec lequel elle a écrit son one-woman-show “Karine Dubernet vous éclate”.

Karine Dubernet a un regard bleu et franc. Bleu comme bleu. Franc comme une poignée de main que je ne peux que fantasmer puisqu’elle ne me l’a pas serrée. Mais voilà, il y a quelque chose dans sa façon de bouger, de vous regarder et de vous parler qui laisse penser que cette fille est directe, honnête et sincère. Qu’elle le soit ou pas dans la vie ne me regarde pas mais j’ai constaté qu’elle l’était sur scène. Et c’est déjà beaucoup. Sur celle du Point-Virgule, elle est tellement maquillée et déguisée que j’ai été étonnée de découvrir son vrai visage en la rencontrant au café qui jouxte le Théâtre du Palais-Royal.

Beaucoup de douceur et de fermeté, de sérénité et d’indignation contrôlée…son visage est l’heureuse rencontre de ceux de la comédienne Marine Delterme et de l’auteur Régine Desforges. D’un côté le regard bleu encadré de boucles brunes, assez doux pour vous embarquer sans verser dans la séduction mièvre; de l’autre, la détermination, l’engagement. Le solaire et le terrien. A l’arrivée, une femme de caractère -après tout, c’est une Marseillaise !- étoffe dans laquelle elle a taillé subtilement les personnages hors norme qui peuplent son show.

Karine Dubernet aime écrire et ça s’entend. Il y a de l’intelligence et des références digérées derrière la plume de cette femme de 37 ans qui a fait ses classes au Conservatoire Régional de Marseille et à La Minoterie et exerce son métier depuis dix ans.

Une Schtroumpfette plus délurée qu’on ne le croit !

Qu’elle soit bonne comédienne c’est une évidence ! Ce qu’elle montre au Point-Virgule, seule sur scène et ce qu’elle déploie en troupe dans les Bonobos où elle incarne une fliquette hors genre laisse penser qu’elle peut devenir l’une des grandes figures de la comédie populaire de qualité. Même si elle place Shakespeare (patiemment étudié pour décrocher une Maîtrise d’anglais) au-dessus de tout, sa place est là : dans l’incarnation de rôles comiques toujours hors bord, hors limite mais jamais hors rire. Elle est du rire qui rassemble, fédère joyeusement sans pour autant céder à la facilité. Du rire de ceux qui l’ont fait rire et qu’elle a inscrits à son panthéon : Muriel Robin, Bigard, Dieudonné, Foresti, Ferrier et, idole parmi les idoles, Caubère.

Karine Dubernet est une véritable artiste doublée d’un auteur malin qui sait comme personne (d)écrire des personnages auxquels on va, qui que l’on soit, s’attacher. Elle les qualifie d’ailleurs «d’attachants et d’attachiants» et avoue être incapable de jouer des personnages qu’elle n’aimerait pas dans la vraie vie. Qu’elle déboule sur scène en diva meneuse de revue plus probablement rescapée d’une croisière Costa que revenue d’un vrai show from Las Vegas, en Schtroumpfette nympho, en transsexuel regrettant sa transformation, en trentenaire qui solde ses comptes avec sa mère, en Père Noël dépressif, en actrice hystéro qui sadise son assistante ou dans la peau de Simone, 89 ans, veuve de Raymond qui sait comment combler sa solitude… il y a toujours beaucoup à prendre, entendre et rire, jamais trop. Bien sûr, ses personnages sont too much, overdosés de souffrance et en total manque d’amour et de considération ! Ils sont monstrueux et dénués d’innocence et quand elle les fait exploser, c’est ça qui nous éclate (titre de son show). Même quand elle se coule dans l’hystérie, on n’est jamais dans la caricature ad nauseum. Car Karine Dubernet sait construire des sketches courts, vifs et vivants et surtout, elle maîtrise l’art de la chute. Pas de gâchis, pas de redite chez cette comédienne qui ne s’économise pas et joue la plupart du temps up-tempo. «L’humour c’est très sérieux, poursuit Karine Dubernet, c’est pas de la microchururgie mais presque. Il faut toujours que je trouve la vérité dans mon personnage, ça passe par une gestuelle, une voix, une posture, un mouvement étudiés au millimètre près. Si on dépasse l’espace qu’on s’est fixé, on se plante !».

On comprend donc pourquoi chez Karine Dubernet, chaque ligne est porteuse, féconde de la promesse d’un gag ou jeu de mots que l’on va sinon aimer, adopter immédiatement. La comédienne mélange les genres et c’est cela qui fait la modernité de son show. Elle mêle la vanne (demandez-vous pourquoi la Schtroumpfette est en avance sur son temps!), le décalage cher au tandem Pierre Dac-Francis Blanche («Votre spectacle, j’y suis allé à reculons du coup j’ai rien vu, j’étais de dos» ), le burlesque, le cabaret (son entrée sur scène est irrésistible), l’arturobrachettisme (le Petit Chaperon rouge se mue en Schtroumpfette). Elle a le sens de la formule («le comble de la patience c’est d’épiler une vieille Mexicaine avec des baguettes en mousse») et celui de la provoc’ (voir la tête du trans’ qui réalise que l’amour sans préliminaires peut être aussi brutal que la pénétration d’un ouvrier sur un chantier)… et de cette somme elle fait jaillir un vrai spectacle joyeusement allumé qui en met plein la vue.

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Impertinence et irrévérence au service du rire, l’auteur-comédienne ne pouvait que s’entendre avec Baffie, un orfèvre en matière de rythme. Avant de co-écrire son show, Baffie l’a d’abord castée pour Les Bonobos, un an plus tôt. «Laurent, j’aimais son travail, reprend Karine. Pour moi qui suis une enfant de la télé, c’est comme si je rencontrais Casimir ! J’aime beaucoup son écriture et en le voyant travailler sur la pièce, je lui ai demandé des sketches. Il en a écrit un puis deux : le transsexuel et le Père Noël. C’est un travail en perpétuelle évolution car il continue d’écrire pour moi». Son énergie à elle, sa puissance de feu à lui font des étincelles. La comédienne est intarissable lorsqu’il s’agit d’évoquer celui qui a su mettre en sketch ce qu’elle avait profondément envie de dire voire hurler, et à qui elle donne la réplique dans Les Bonobos. «Laurent Baffie est très sérieux, très rigoureux. Il calcule tout et peut compter le nombre de rires tous les soirs et remettre en question son texte s’il y a une perte de rire. Laurent est rompu à l’art du bon mot, c’est un bon vanneur qui écrit des vannes avec un fond. C’est quelqu’un d’intelligent, de fin et cultivé. Il a l’art de la précision et c’est l’un des rares à posséder ce sens de la rythmique».

Héritière de Zaza Napoli et de la grande Zoa

S’agissant de rythme, on se demande d’où vient l’énergie de Karine Dubernet et comment elle la récupère. Par où et comment ça passe ? «J’en ai pas mal, c’est vrai, explique cette bosseuse capable de  jouer le dimanche après-midi Les Bonobos et son show le soir, mais le public m’en donne pas mal». Fort heureusement, la comédienne s’est aménagé quelques plages de respiration, joyeux intermèdes pendant lesquels, assise dans un coin de la scène, elle écrit des lettres au Père Noël ou lit le faux courrier des spectateurs venus voir son show.

C’est un bonheur de voir Karine Dubernet sur scène dans la pléiade de personnages barrés qu’elle investit. Et pour elle, un vrai plaisir d’ épouser un genre auquel elle ne se sentait pas destinée. «C’est Rodolphe Sand, metteur en scène avec qui j’avais travaillé qui m’a conseillé de me lancer seule, précise-t-elle. Il a pensé que mon énergie et ma personnalité conviendraient parfaitement à un seule-en-scène. C’est très agréable mais aussi très difficile pour moi qui suis d’abord une comédienne de troupe. Et puis, je ne savais pas quoi raconter. Rodolphe m’a encouragée à écrire des personnages. Je me suis inspirée de gens que je connaissais. Simone, c’est la grand-mère de mon meilleur ami. Aujourd’hui, j’aime tellement le show que je ne pourrais plus m’en passer».

Karine n’abandonnera pas pour autant le travail en troupe. Quand elle ne joue pas au Palais-Royal et au Point- Virgule, la comédienne écrit les prochains spectacles dans lesquels elle compte bien jouer. En gestation, “Bonnes mères”, une comédie de boulevard sur l’homoparentalité, thème qui la concerne directement, et dans laquelle elle a d’ores et déjà castée Isabelle de Botton. Elle travaille également au développement de “Les Héroïnes 1 et 2″, «l’histoire de trois copines qui traversent une grosse galère». Une histoire de tout évidence très éloignée de sa vie puisqu’en ce moment, tout lui réussit.

Pour applaudir Karine Dubernet

Karine vous éclate (textes de Karine Dubernet et Laurent Baffie, mise en scène d’Olivier Solivérès) au Théâtre du Palais-Royal : le 23 avril à 20h (location : 01-42-97-40-00) et tous les dimanches à 21h15 au Point-Virgule (location:01-42-78-67-03)

Les Bonobos, comédie écrite et mise en scène par Laurent Baffie au Palais-Royal : du mercredi au samedi à 20H30.

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